Une actualité fraîchement bouillante.
Je finis de lire aujourd’hui même, ce livre dont on reparle,
à l’heure où j’écris ces lignes même, avec tant de passion, faute, peut-être,
aux récentes interviews données par l’auteure Outre-Manche. Les passions…
Parlons-en ! Ce livre les a autant déchaînées qu’exposées ! De fait, tout
le monde a parlé de cet ouvrage. En bien, en mal, en intelligence ou non… Quoi
qu’il en soit, personne n’est resté de marbre ! Comment en aurait-il pu être
autrement d’ailleurs ? Les confessions passionnées d’une ex-première dame ne
pouvaient qu’attirer les fouler et attiser les curiosités. Le tapage médiatique
n’arrangeant, en outre, pas vraiment.
C’est bien d’ailleurs face à ce tapage que m’est venue l’envie
de lire ce livre. Chacun allant de son petit commentaire, positif ou négatif,
chacun interprétant les lignes écrites par l’ex première dame d’une façon ou
d’une autre (souvent d’ailleurs bien différente), il m’était impératif que de
me faire une opinion personnelle sur ce livre ô combien polémique.
Les lignes que vous allez lire, la chose mérite d’être
précisée avant toute critique, ne reflèteront en ce sens que mon avis propre,
subjectif par nature, discutable par essence,
mais mon avis tout de même. Aussi, vous serez seul juge d’en apprécier,
ou non, la teneur.
L’illégitimité, un thème particulièrement récurrent.
Pour commencer cette « critique » je tenais à
aborder une thématique particulièrement récurrente de cet ouvrage :
l’illégitimité. Celle de l’ex-première dame. Comme pour illustrer mon propos, l’auteure
l’explique d’ailleurs fort justement dans son chapitre 10, cette notion
d’illégitimité apparaît comme un « leitmotiv »
tout au long des lignes de son livre… Elle est le fil conducteur de son témoignage,
son point de départ même. L’illégitimité de son statut de première dame, celle
de son accession dans cette strate sociale voir même, tout bonnement, de la
publication de son ouvrage…
On ressent, tout au long de ces lignes, l’impression de Mme
Trierweiler que de ne pas être à sa place. On convient d’ailleurs assez
aisément que l’opinion publique, comme les médias d’ailleurs, ne l’ont pas aidé
à prendre ses marques… Mais tristement,
ce n’est pas ce qui m’est resté à l’issue de son témoignage. Davantage que
cette illégitimité, c’est la crédulité de l’auteure qui m’a intrinsèquement
marqué… une telle crédulité, qu’il m’a d’ailleurs été possible d’en douter…
Une crédulité manifeste frisant d’ailleurs même parfois avec une certaine
forme d’hypocrisie.
Plusieurs fois en effet, ce sentiment d’hypocrisie m’a
saisie. Je m’explique.
Concernant son
histoire d’amour avec le Président tout d’abord :
L'auteure témoigne en effet, à plusieurs reprises, d’une
relative incompréhension face à « l'affaire Gayet » et ce, en
rapprochant pourtant cette dernière à la situation qu'elle a pu vivre lors des
premières infidélités de François Hollande dont Ségolène Royal a été l'objet...
Ce qui étonne effectivement, au travers de ce témoignage,
c'est la crédulité d'une femme pourtant instruite et renseignée sur la chose...
Un homme ayant été infidèle une fois pourrait-il ne plus jamais l'être alors ?
On se plaît en effet à le croire : les individus changent ? Mais comment
réfuter cette hypothèse avec tant d’ardeur ? Comment croire un homme que
l’on a soit même « détourné » de l’amour de sa femme ? Les bras
lui en tombe mais n'était-ce pas, en un sens, à prévoir? L’adage ne parle-t-il
pas d’un « arroseur arrosé » ?
En outre, l’ex-première dame n’aurait intrinsèquement pas
été, selon elle, responsable de son amour avec François Hollande… Elle reporte
d’ailleurs la faute de la première infidélité du futur président sur Ségolène
Royal elle-même puisque, selon elle « L’idée d’une histoire sentimentale avec François Hollande ne l’avait
pas effleurée. L’irruption de Ségolène Royal, qui [redoutait] par-dessus tout cet amour, [étant venue],
sans doute, le rendre possible à [ses]
yeux » ou bien encore sur François
Hollande lorsqu’elle explique qu’ « [elle a] résisté le plus longtemps possible à cette attirance entre François et
[elle]. [Que] c’est lui qui était
pressant, lui qui a fait basculer [leur] amitié amoureuse en amour-passion » et ce, alors qu’elle explique
quelques ligne plus loin qu’elle « […] sais
qu’elle lui plait, [que leur] complicité
est évidente, [qu’] elle est comme
une amitié particulière, un peu appuyée, qui flirte parfois délicieusement avec
l’ambiguïté ».
Concernant les
critiques qu’elle émet à son encontre ensuite :
Tout au Long de son livre, elle accuse en effet le président
d'obérer le caractère public de ses fonctions par des faits privés (on se
rappellera, pour exemple de l'affaire du tweet de Ségolène Royal) mais ne
participe-t-elle pas, elle aussi, a cet entrisme du privée dans la sphère
publique dans les faits qu’elle nous relate tout au long de son ouvrage ?
En cédant à ses pulsions, à ses accès de colère, en tweetant
pour faire réagir, cette dernière se rend elle aussi coupable d'un manque de
sens général... Pire encore, elle en oublie son rôle « politique » de
première dame... De fait, pas de statut... Certes... Elle l’évoque d’ailleurs à
juste titre dans son ouvrage… Mais un indéniable devoir moral tout de même...
Celui de représentation, à son échelle, de l'Etat français...
Tout le paradoxe est ainsi là : elle critique la
surmédiatisation de la vie privée du Président mais s'y affère pourtant en publiant
cet ouvrage avant le terme même du mandat présidentiel. Qu'on aime ou non
François Hollande qu'on soit de gauche ou de tout autre bord politique, ce
qu'on peut regretter de la publication de ce livre, à ce moment-là du
quinquennat, c'est l'image ternie qui en résulte de celui qui représente notre
pays...
Concernant sa propre
vie enfin :
A plusieurs reprise dans son livre, elle explique n’avoir
jamais calculé, jamais manipulé,… Elle explique en être arrivée là où elle en
est par sa seule force de caractère, sa seule volonté, son acharnement et sa
détermination… Mais, paradoxalement, nous exprime également que le monde du
journalisme politique, de la politique elle-même d’ailleurs n’est que
manipulation…
Elle l‘évoque en ces termes : « Dans le sérail, on est habitué aux non-dits,
on sourit à ceux que l’on méprise, on médit dans l’ombre ».
Il est douteux et doutable, et c’est un sentiment qui m’a
plusieurs fois saisi en lisant cet ouvrage, à juste ou mauvais titre, chacun
jugera, que l’ex première-dame n'ait pas été au bon endroit, avec les bonnes
personnes, sans une once d’opportunisme, sans calcul ni manipulation... La
petite provinciale naïve venue d’une ZUP d’Anger serait arrivée là par
hasard et ce, alors même qu’elle nous témoigne à plusieurs reprises,
« manquer de culture politique, [manquer] de culture tout cours » ?
En témoignage de ce doute qui reste en bouche après lecture de
ce : « J’ai aussi quelques entrées à
l’Élysée. Ce n’est pas fréquent pour une jeune journaliste. Les plus anciens de
Match en charge de la politique ne me voient pas arriver d’un bon œil. Six mois
plus tard, le légendaire patron du journal, Roger Thérond, m’engage, au plus
bas de l’échelle, comme rédactrice ». Des entrées à l’Elysée sans même
être encore, professionnellement parlant, qui que ce soit ? La
« virginité morale » de l’ex-première, est en ce sens assez
discutable selon moi. Il ne s’agit pas d’un procès d’intention, loin de là. Il
est tout à l’honneur de l’ex-première dame d’avoir une carrière telle que la
sienne compte tenu de son milieu social d’origine, loin d’être favorable et
dont elle parle à plusieurs reprises dans son livre mais, crédule serait celui
qui s’imagine pouvoir pénétrer les arcanes du monde politique sans
« copiner » à un moment ou un autre de sa carrière. C’est cela qui
est à mon sens critiquable, le manque relatif d’honnêteté intellectuelle là où la réalité des choses
est pourtant connue de tous.
Ainsi, l’idée, à la lecture de ses lignes, m’a semblé être
de séduire le lecteur, d’emporter sa compassion, d’attirer son attention sur la
volonté de l’auteure que de devenir « quelqu'un » dans un monde qui
ne l'a fondamentalement pas gâté socialement parlant, que de s’émanciper de sa
« catégorie » sociale, que de « détruire son plafond de verre » pour reprendre ses mots...
Le « traumatisme » de son enfance dû à la
condition sociale de ses parents semble aussi réel qu’avéré mais c'est le motif
de ses confessions qui rend la chose discutable à mon humble sens... J’ai
personnellement ressenti une certaine volonté de convaincre en lisant ce livre... La volonté
de faire comprendre des choses qui justifierait ses actes... Ceux du tweet, ceux
du baisé demandé lors du discours post-élection,…
Le pouvoir de l’amour défait par l’amour du pouvoir : l’envers du décor.
Ce livre nous dresse en outre un portrait peu flatteur du
président actuel : froid, indifférent, colérique, parfois même cruel
(cf : les « sans dent »
ou la « famille Massonneau pas très
jojo » dont on a suffisamment parlé dans les médias). Le président
normal, au travers de ces lignes est bien malmené…
Pour autant ce qui devait conduire à un réel désamour de ce
dernier n’a pas eu l’effet escompté chez moi… Sans avoir été jamais proche de
François Hollande, ces lignes, supposées le discréditer ont eu sur moi l’effet
inverse… elles ont suscité, à certains moments (certains passages traitant de
son comportement étant tout bonnement insoutenables…) une certaine forme de
compassion… Résultant, notamment, je pense, de la charge de la responsabilité politique
pesant sur l’homme. Ce qui m’a davantage étonné c’est le manque d’empathie dont
a pu faire preuve l’ex-première dame lors de certains passage, notamment
lorsqu’elle raconte le soir de l’élection du futur président :
« Le temps
presse, la foule amassée place de la Cathédrale attend depuis déjà plusieurs
heures. Je demande à François de prendre le temps pour quelques photos car ce
moment est unique. Mais François s’agace et me rembarre violemment. Je ne
comprends pas sa réaction. Cette minute qui aurait dû être un instant de
bonheur vient d’être gâchée. Je vais m’enfermer dans la salle de bains
attenante. Pour moi aussi, la tension a été très forte et se relâche ».
La « tension a été forte »…
La « tension est forte » serait plus approprié… Etre élu ce n’est pas
la fin de quelque chose… C’est bien davantage le début ! Ce qui choque, en
l’espèce, c'est l'incapacité de l’ex-première dame de faire montre
d'empathie... Il y a le stress d'un discours qui marquera l'histoire, celle du
nouveau Président mais aussi, et surtout, celle de la France mais encore parce
qu'humain, surement, la crainte de jours difficiles malgré la « victoire »...
Des sentiments d'une réelle ambivalence en somme qui peuvent pousser l'homme surement
déjà à fleur de peau à l'agacement et qui pourrait en ce sens expliquer le
geste...
A lire ou non ?
J’aurais très sincèrement aimé ne garder en mémoire, que le
bon qui ressort de ce livre. L’investissement humanitaire, associatif, les
témoignages de ces femmes violées de République Démocratique du Congo lorsque
l’ex-première dame visite l’hôpital du docteur Mukwege, le témoignage de ce
jeune handicapé fan de Philippe Croizon, son modèle, ou bien encore la
narration de la journée pour les « Oubliés des Vacances ». Mais la
dure réalité, c’est que le ton, malgré ces sursauts de compassion, d’humanité,
vire trop souvent à la vengeance… Plusieurs fois l’on a envi de céder à la
compassion, de faire montre d’empathie, de comprendre cette femme trahie,
humiliée publiquement, mais la vengeance rend la chose malaisée, elle ne permet
pas de passer outre la colère exprimée, ressentie même… Le sentiment est là que
ce livre n’a pas été écrit pour soulager sa tristesse mais pour laver l’affront
du Président, comme pour le blesser là ou l’ex-première dame identifie une de
ses faiblesses : son aura auprès de « l’opinion publique ».
L’ex première dame parle, de manière récurrente, de dignité…
n’aurait-il pas été plus digne alors, pour elle, que de mettre un terme à cette
spirale de l’humiliation… encore aujourd’hui même cette dernière rajoute au
spectacle dans ses interviews rendues Outre-Manche… c’est tout cela qu’on regrette à la
lecture de ce livre… c’est l’affront fait à la France pour laver un honneur
personnel… C’est l’oublie d’une nation pour recouvrer, d’une triste manière,
fut-elle d’ailleurs recouvrée, une malheureuse dignité …
En conclusion : le lire oui, l'acheter non. De fait,
acheter un tel ouvrage c'est donner du crédit à de telles pratiques qui,
qu'importe la souffrance « du plus lésé des deux », ternissent
l'image de notre représentant et, par extension, celle de notre pays.
L'ouvrage, publié à l'issue du quinquennat, en tenant compte de l'éthique et de
la déontologie politique, fussent-t-elles existées un jour, du sens commun
même, aurait été bien plus apprécié (mais moins médiatique
et donc moins attrayant d'un point de vue mercantile diront certains...).